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PROTECTION FONGICIDE A l'échelle du système de culture

Jean-Noël Aubertot de l'Inra d'Auzeville, lors de la Cima 2012 en décembre à Tours : « Nous cherchons comment établir des systèmes de cultures qui réduisent le stress abiotique, et des voies de progès pour réduire l'IFT. »M. LOISON

La prise en compte des systèmes de culture plus solides face aux maladies et aux stress est une préoccupation évoquée lors de la Cima 2012, 10e conférence sur les maladies des plantes.

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Comment établir des systèmes de culture qui limitent les stress ? C'est l'une des questions à laquelle s'efforce de répondre l'Inra. Jean-Noël Aubertot, en charge de la protection intégrée à l'Inra de Toulouse, a rappelé quelques chiffres clés lors de la Cima 2012 (du 3 au 5 décembre, Tours) : sans protection, la perte se chiffrerait à 50 % du rendement potentiel maximal du blé et 75 % de la pomme de terre. Avec une protection, la perte se réduit à 28 % en blé et 40 % pour la pomme de terre.

Outils et stratégies durables

« Une protection des cultures permet de maîtriser les pertes de récolte. Mais il faut déterminer des voies de progrès pour réduire le nombre d'applications », ajoute le chercheur. Trois pistes sont évoquées : les techniques mécaniques en particulier pour le désherbage, l'application des outils de décision, la reconception du système de culture capables de mieux s'autoréguler face aux agresseurs.

L'Inra développe deux modèles qui vont aider à concevoir des stratégies durables : Sippom qui aide à prévoir l'adaptation des pathogènes et à y répondre. Ipsim Wheat qui prédit un profil de dégâts et permet d'anticiper sur les moyens de lutte fongicide sur le blé. Au-delà de ces travaux, plusieurs outils et stratégies sont développés par les instituts techniques pour gérer une maladie dans un cadre plus global, en intégrant la succession des cultures.

Agnès Champeil de l'ITB a présenté une stratégie de protection contre le rhizoctone brun à l'échelle du système de culture. Ce champignon polyphage est présent en maïs, betterave sucrière et pomme de terre... Il peut provoquer la perte complète de certaines lignées de maïs semence, et aussi 40 % de pertes de production en betterave sucrière et pomme de terre. C'est pourquoi l'ITB a hiérarchisé les pratiques agricoles pouvant être mises en oeuvre pour réduire l'inoculum : lavage du matériel, alternance avec des cultures de céréales non hôtes, gestion des résidus et des repousses, cultures intermédiaires, assainissantes. Le conseil va jusqu'à proposer des rotations adaptées, en particulier dans les zones qui cultivent maïs-semence et betterave, comme la Limagne.

La génétique en appui

L'autre stratégie d'adaptation des systèmes de culture passe par la variété. « Ces dernières décennies ont vu la dissémination et l'émergence des agents pathogènes s'accroîtrent en lien avec la mondialisation des échanges, la politique de réduction des intrants et le réchauffement climatique », souligne Thierry Jaunet, de Clause Vegetable Seeds. C'est pourquoi la mise sur le marché de résistances adaptées doit se faire de façon réactive. Sur le blé, Arvalis a montré que l'introduction de certains gènes (Stb) pourrait apporter un gain de résistance sur la septoriose. Mais il faut aussi s'efforcer de mieux comprendre la durabilité des résistances. Pour le colza, l'enjeu est de renforcer la résistance au sclérotinia. Afin d'identifier les futures variétés résistantes au moment de leur inscription, le Cetiom poursuit son projet « Sclerovar » en collaboration avec le Géves, l'Inra et le GIE Procolza. Il permettra de prédire le comportement des génotypes de colza vis-à-vis du sclérotinia, en prenant le cycle du champignon. De son côté, le Géves a accentué l'orientation de la sélection vers des variétés plus résistantes. Depuis 1984, un bonus ou un malus sont accordés en fonction du comportement par rapport aux maladies du blé (septoriose, fusariose, piétin verse, rouille jaune, rouille brune). Pour d'autres espèces, la trop grande sensibilité d'une variété à une maladie peut être un motif de refus de mise sur le marché. C'est le cas avec le phoma du colza depuis 1986, ou bien encore avec le phomopsis et le sclérotinia du tournesol.

La Cima 2012 aura été l'occasion aussi de présenter les nouveaux fongicides. Deux SDHI sont annoncés chez DuPont et Syngenta : le penthiopyrad et l'isopyrazam (ou IZM). Autres innovations : un antibotrytis vigne de Philagro et un anti-oïdium chez Belchim. Le penthiopyrad fait partie des fongicides de la famille des SDHI. Issu de la recherche Mitsui Chemicals Agro, il sera développé par DuPont sur les céréales, le tournesol, les arbres fruitiers et les cultures légumières. Il se caractérise par une activité curative, une excellente résistance au lessivage, ainsi qu'une très bonne redistribution de la substance active.

Pour respecter les recommandations du Frac, il ne devra être utilisé sur céréales qu'en mélange avec un autre mode d'action efficace sur septoriose, et de façon préventive ou en tout début d'infection.

Quatre nouvelles matières actives

L'isopyrazam (ou IZM) appartient lui aussi au groupe des SDHI. Provenant de la recherche Syngenta, il assure une protection contre les principales maladies foliaires des blés, des orges mais aussi des céréales secondaires. Son activité permet de contrôler certaines maladies des cultures légumières et des fruits. Les performances de l'IZM seraient élevées du fait de la double fixation de la molécule sur la feuille et les champignons. Deux produits sont actuellement en cours d'évaluation en France, l'un étant pour les orges, l'autre pour diverses céréales. La fenpyrazamine est une nouvelle substance active de Sumitomo Chemical Company. C'est sur la vigne qu'elle va être développée par Philagro, et intégrée dans les programmes de lutte. Très efficace contre le botrytis, avec une activité translaminaire, ce fongicide agit en préventif, même appliqué peu après la contamination. Les études montrent que si les bonnes pratiques sont respectées, il est neutre ou faiblement toxique vis-à-vis des auxiliaires.

Quant au nouvel anti-oïdium de Belchim, il sera développé en vigne, mais serait aussi intéressant sur les céréales et les cultures légumières. Découvert au Japon, sa matière active, la pyriofenone, appartient à une nouvelle famille chimique. Elle peut être appliquée en préventif et en curatif, offrant une longue période de protection de la culture traitée. Ces quatre matières actives montrent que l'innovation reste active sur le segment fongicide.

Marianne Loison

Les plans de surveillance indiquent un nombre de parcelles en hausse pour les souches d'oïdium de la vigne résistantes aux fongicides Qols (strobilurines) et IDMs (triazoles) en 2011. Côté botrytis, il y a une tendance à la baisse ou à une stabilisation des souches résistantes, selon les vignobles et les phénotypes, due à l'effet positif des préconisations d'alternance et à la limitation des applications. Pour le mildiou, la forte implantation de la résistance aux fongicides CAA (iprovalicarbe, benthiavalicarbe, mandipropamid, valifénalate) est confirmée sur les trois dernières campagnes. Quelques souches résistantes aux Qil (cyazofamide) ont été identifiées depuis 2010. Aucune dérive n'est relevée avec la zoxamide.

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